Le levain, cet être mystérieux
Il est difficile d’expliquer clairement ce qu’est un levain sans tomber dans un flou mystique ou dans une énumération scientifique. Je vais tenter d’y voir plus clair avec l’expérience du réel plutôt qu’avec les lectures que j’en ai fait.
Deux ingrédients seulement sont nécessaire à la mise en vie d’un levain chef. De l’eau et de la farine, complète ou tamisée. De la farine blanche, c’est-à-dire dépouillée du son et des matières grasses du grain, ne sera pas assez nutritive pour permettre au levain de survivre.
L’humidification de la farine éveillera les enzymes contenus dans la farine et ceux-ci décomposeront les sucres complexes de l’amidon du grain en sucres simples. Ces sucres simples seront à leur tour dévorés par les bactéries planant dans l’air que nous respirons. Leur digestion créera du gaz carbonique et c’est précisément ce gaz, retenu par le gluten, qui fera apparaître les bulles que nous pouvons voir dans le levain. Voilà une démonstration de la fermentation!
Pour donner vie à un levain chef il faut le nourrir, c’est-à-dire ajouter de l’eau et de la farine deux ou trois fois par jour. Il faut d’abord enlever une partie de levain pour ensuite incorporer de la farine et de l’eau. On cherche à doubler ce qui reste. Il doit être dans un environnement chaud et humide pour croître (dans un four avec la lumière allumée et un bol d’eau chaude par exemple). Après quelques jours de ce scénario, le levain chef devrait commencer à former des bulles et dégager une odeur légèrement vinaigrée. Si l’odeur est trop forte, le levain fermente trop rapidement et il suggère une alimentation plus fréquente.
Maintenant que le levain chef est au garde à vous, il ne reste qu’à l’entretenir régulièrement et le conserver à une température pièce. Lors d’une fournée, on prend une partie du levain chef à part et on ajoute de l’eau et de la farine pour obtenir la quantité dont on a besoin pour les pâtes à pain. Le levain chef quant à lui continue sa saga et peut ainsi survivre plusieurs années.
Les bienfaits du levain sont innombrables. Le plus important est qu’il rend les pains plus digestes par son action de pré-digestion des pâtes lors de la levée. Les enzymes contenus dans le levain permettent l’apparition de phytase, élément essentiel pour le travail des intestins, qui neutralise l’acide phytique, présent dans les céréales complètes, particulièrement agressif pour les réserves calciques humaines. Ingéré en trop grandes quantités, cet acide, se combinant aux minéraux de l’organisme, en particulier le calcium et le magnésium, peut être cause de déminéralisation.
L’avantage le plus immédiat est, bien entendu, la saveur, nettement plus agréable et plus subtile que celle du pain à la levure. Le levain apporte aussi plus de croquant à la croûte du pain, de gros trous dans la mie et un alvéolage irrégulier qui donne une impression de rustique.
Autre avantage considérable : la conservation. Le pain au levain se conserve bien mieux que le pain à la levure de boulangerie. Un pain au levain bien fait rassit lentement et reste très bon pendant une semaine sans problème et parfois davantage dans un torchon. Celui à la levure, au contraire, rassit souvent en une journée.